samedi 23 août 2014

IRAK. Exécution du journaliste James Foley : Une autre arnaque ?


Un décor de choix. Des sons et des images de bonne qualité. Un montage léché. Pas de détails sordides inutiles. Pas d’éclaboussure de sang. Pas de hurlements d’Allah Akbar. Un « message à l’Amérique » certes, mais par-dessus tout un message à l’Oumma. Nous sommes les méchants hommes en noir. Nous dirigeons le Califat. Nous sommes plus qu’un simple culte de la mort : nous sommes victorieux. Et nous ne faisons pas de quartier.

Au fait, savez-vous pourquoi l’État islamique (EI), l’ancien EIIL, est victorieux ? C’est parce que « l’Occident » a embrigadé, scolarisé, formé, aidé du point de vue logistique et armé la plupart des takfiris de l’EI avec une mission à accomplir : détruire la Syrie. « L’Occident » faisait l’éloge de ces « rebelles syriens », combattants de la liberté.
Washington a même promu les combattants du front Jabhat al-Nosra (le bureau franchisé officiel d’Al-Qaïda en Syrie et « organisation terroriste » selon le département d’État) en « bons » djihadistes, tout comme le Front islamique, le combo préféré des Saoudiens.
Pas étonnant donc qu’après le kidnapping du photojournaliste James Foley en novembre 2012, la version sanctionnée par Washington était qu’il était entre les mains des forces d'Assad dans une prison près de Damas.

La vraie histoire de la capture de James Foley

Les détails de l’enlèvement de James Foley et son déplacement entre les prisons du front al-Nosra et Daesh sont connus de nombreux journalistes et des responsables des organisations d’aides au sud de la Turquie et au nord de la Syrie. Mais un blackout a été imposé sur la réalité de sa cause et l’identité des kidnappeurs. 
Foley s’est déplacé en Syrie en compagnie d’un journaliste britannique qui était en animosité avec le front al-Nosra : « Le britannique a été enlevé à Atama, et détenu pendant plusieurs jours par des djihadistes dont Mohammad el-Absi et des combattants étrangers. Le journaliste britannique a été ensuite libéré par des brigades locales affiliées à l’armée syrienne libre. Mais il a déposé une plainte juridique contre des personnes détenues chez les autorités britanniques pour implication dans l’enlèvement ».
Dès l’arrivée des deux journalistes à Banche, ils sont allés à un cybercafé, et ont essayé d’enregistrer une interview avec un combattant étranger présent dans le village, mais ce dernier a refusé de parler avec eux. En quittant Banche, une voiture qui transportait les deux journalistes – avec le traducteur et le conducteur – a été arrêtée à un barrage du front al-Nosra. Le traducteur a été libéré quelques heures après son arrestation.
Le conducteur a été battu et ensuite libéré. Les deux journalistes occidentaux sont restés aux mains du front al-Nosra.
Reste à rappeler que suite à la disparition de Foley en 2012, l’opposition syrienne et des parties occidentales, comme le journal Global Post au compte duquel travaillait James Foley, ont publié un communiqué (après une enquête d’une compagnie sécuritaire américaine spéciale) dans lequel ils accusaient le gouvernement syrien de détenir Foley et de démentir sa présence dans ses prisons.
Pis encore, après la divulgation de la vidéo montrant la fausse décapitation de Foley par Daesh, des milieux de l’opposition ont prétendu que le régime syrien a remis Foley à Daesh pour le décapiter !

Mais voilà : le porte-parole officiel du gouvernement syrien, Bouthaina Shaaban a  affirmé que Foley avait été assassiné par des militants de l'Etat Islamique il y a un an. "James Foley a été arrêté par l'armée syrienne libre et a été vendu à ISIS [ndlr: EIIL: Etat Islamique en Irak et au Levant].Vous pouvez vérifier auprès de l'ONU ... James Foley a été tué il y a un an, pas maintenant. Ils publient les photos maintenant mais il a été tué il y a un an. Nous avons des renseignements précis, l'ONU dispose de ces informations", a déclaré Shaaban.

L'assassinat : une vidéo de professionnels

Le comble de l’horreur pour les médias occidentaux ne réside pas dans les montagnes de cadavres sanguinolents qu'on voit tous les jours en Irak, en Syrie et en Ukraine, mais dans le meurtre (par égorgement) d’un journaliste, qui plus est américain...
Sauf que, généralement, les nombreux petits films tournés par les jihadistes du monde entier sont d’assez mauvaise facture : cadrage incertain, image de mauvaise qualité, son médiocre. Parfois un effort est fait dans l’habillage : incrustation d’un logo et alternance entre discours et chants de guerre. 
La vidéo de la décapitation de Foley, est quant à elle, particulièrement soignée tant sur le fond que sur la forme.


Un support HD et une mise en scène troublante

-  Qualité Haute Définition de l’image et du son.

-  La scène est filmée par deux caméras sur pieds.

- Un petit logo animé dans le coin en haut à gauche, représentant soit un minaret surmonté d’un croissant, soit le drapeau noir de l’État islamique, selon les versions.

-   Les protagonistes sont équipés de micro-cravates afin de bien entendre leurs paroles, celles-ci ne sont pas parasitées par le vent qui souffle.

-  Détenu depuis des mois, Foley et son comparse semblent en bonne santé : ni épuisés, ni amaigris malgré leur captivité.
- Les deux otages portent des tenues oranges, visiblement neuves, rappelant les uniformes des détenus de Guantanamo.
- Bien qu’il soit à quelques minutes de perdre la vie, Foley ne sourcille pas, ne bafouille pas, ne transpire pas : il reste d’une dignité surprenante.
-  Le débit de Foley ressemble à un jeu d’acteur : solennel lorsqu’il récite son discours, puis maladroitement ému lorsqu’il s’adresse à sa famille.
Un message efficace
-       Le discours est à destination d’un public occidental : pas de prêches en arabe, pas même les habituelles Allahou akbar qui saluent l’égorgement ou la décapitation des prisonniers, toutes les paroles sont en anglais.
-       L’État islamique n’est pas présenté comme un simple rassemblement de hordes islamistes en pick-up mais comme une entité puissante, qui suscite l’adhésion des masses musulmanes du monde entier.
Le bourreau : « Vous ne combattez plus une insurrection : nous sommes une armée islamique et un État qui a été accepté par un grand nombre de musulmans dans le monde. »
Le président et le gouvernement des États-Unis sont directement mis en cause et son peuple menacé : Foley dit : « Je demande à mes amis, ma famille et ceux que j’aime de s’en prendre à mes vrais assassins, le gouvernement des États-Unis. Aujourd’hui, votre force aérienne militaire a attaqué nos positions en Irak. Vos frappes ont causé des pertes parmi les musulmans. (…) Donc, toute tentative de toi, Obama, de dénier le droit aux musulmans de vivre en sécurité sous leur califat aura pour conséquence un bain de sang de ton peuple. »

Après le discours de Foley, sa mise à mort intervient. Chose étrange et d’une pudeur inédite dans les vidéos de meurtres à l’arme blanche tournées par les jihadistes, la scène est rapidement coupée. Quelques images montrent le bourreau cisaillant avec une lame assez modeste la gorge du malheureux et cela sans qu’aucune goutte de sang ne gicle. On ne voit ni la totalité de la décapitation, ni la tête ôtée et brandie fièrement. Seul un plan fixe présentant une tête très abîmée posée sur un corps couché sur le ventre. D'ailleurs, en islam, quand on égorge on doit le faire obligatoirement de la main droite, or l'égorgeur de la vidéo hollywoodienne tient le couteau dans sa main gauche...


Réapparaît alors notre bourreau, propre comme un sou neuf et tenant cette fois sous sa domination Steven Sotloff, pigiste pour Time, World Affairs et le Christian Science Monitor, kidnappé en août 2013 à Alep et affublé de la même tenue orange que Foley.
L’homme en noir attrape Sotloff par le col et prononce l’ultime mise en garde :« La vie de ce citoyen américain, Obama, dépend de ta prochaine décision. » 
JPEG - 34.4 ko
narco-terrorisme au Mexique, pas loin des USA !
l'horreur n'apparaît que là où on la montre.

Et on nous sert toujours les horreurs sanguinolentes des islamistes ; or l'image présentée illustre la guerre des cartels au Mexique, pays chrétien s'il en est, où rien que dans l'année 2011, près de 500 personnes ont été sauvagement décapitées !
Authentifiée par le FBI... on est surpris par la qualité de la vidéo (images, son et mise en scène) et interpellé par son contenu : une véritable déclaration de guerre de l’État islamique (contre les États-Unis) se prétendant soutenu par la majorité du monde musulman et illustrée par la mise en scène de la mort d’un beau et jeune journaliste US par un bourreau issu des belles contrées occidentales (celui-ci s’exprime dans un anglais à l’accent britannique).
Scandaleux ! barbare ! inhumain ! Les commentaires des médias et des politiciens occidentaux sont unanimes et nul ne saurait réclamer autre chose qu’un soutien inconditionnel à l’Oncle Sam sur le mode : « Aujourd’hui nous sommes tous des journalistes américains ! » . Cela ne vous rappelle-t-il pas le fameux "Nous sommes tous des Américains" après la colossale arnaque  du 11 septembre (World Trade Center) qui a permis aux USA d'envahir l'Irak ?

Hypothèse-1 : l'homme exécuté n'est pas "Foley"

L'exécuté à gauche, le vrai Foley à droite
Pour ceux qui le connaissent, l'homme qui qui récite son texte devant les caméras de la vidéo n'est pas James Foley. Alors, où se trouve, en ce moment le vrai James Foley, spécialiste des enlèvements ? Où qu’il se trouve, s’il n’est déjà mort (ce certains affirment) , sa vie ne vaut plus un clou. Après un tel raffut international sur son ‘’exécution’’, comment laisser à un journaliste la possibilité d’écrire un jour ses mémoires, ou d’être vu accidentellement par des familiers que l’on ne maitrise pas ?

Hypothèse-2 : la vidéo est un simple montage, une mise en scène

Selon le Times, repris par le Telegraph, une entreprise médico-légale qui collabore habituellement avec les forces de police britanniques considère que le meurtre de James Foley a eu lieu hors-caméra, la vidéo diffusée étant un montage à base d'effets spéciaux. 
Les soupçons des spécialistes sur l'authenticité de l'exécution filmée se portent tout d'abord sur l'absence de sang, alors que le combattant de l'Etat islamique blesse "James Foley" au cou au moins six fois. Les sons émis par le journaliste américain lors de ce qui est vu comme sa décapitation ne correspondraient pas non plus à ce qui est attendu d'une telle souffrance. L'idée d'une mise en scène pose également la question de l'identité du véritable meurtrier de James Foley, alors que l'homme à l'accent britannique vu dans la vidéo serait un londonien de 24 ans, Abdel-Majed Abdel Bary.

But de l'arnaque : revenir en Irak et bombarder la Syrie

Déjà, le Pentagone a clairement averti le public étasunien : l’État islamique, c’est du sérieux, une masse de professionnels surentraînés, surarmés, aux poches pleines de dollars et qui ont prévu de s’en prendre aussi bien aux populations du Proche-Orient qu’au peuple américain. Chuck Hagel, le secrétaire à la Défense des États-Unis a d’ailleurs affirmé jeudi, lors d’une conférence de presse commune avec le général Martin Dempsey, chef d’état-major des armées des États-Unis : « La menace de l’État islamique va au-delà de ce que nous avons déjà connu. »
Et d’ajouter qu’en plus des frappes sur le territoire irakien, il faudra aussi mener des raids aériens en Syrie...Nous y voilà : la justification est toute "trouvée" pour revenir aux bombardements contre la Syrie.
Chassez l’envahisseur yankee par la porte, il reviendra par la fenêtre... Damas l’a bien compris puisqu’elle a averti Washington qu’elle ne saurait accepter des bombardements de l’US Air Force sur son sol. Après sa débâcle annoncée en Ukraine, Obama va chercher à prendre sa revanche sur Moscou en massacrant la Syrie.
Hannibal GENSERIC

VOIR AUSSI : 

 L'Arabie Saoudite panique devant le Califat 

Mise à jour le 04/09/2014 : Le journaliste Sotloff décapité était un Israélien formé dans une antenne du Mossad

C'est désormais officiel : au lendemain de l'annonce de la décapitation de Steven Sotloff, la France a fait savoir, à l'issue d'un conseil restreint de Défense, qu'elle n'excluait pas "une réponse, si nécessaire, militaire" face à l'Etat islamique.


Quelques heures auparavant, une information singulière avait été publiée via Twitter: un porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères révéla que le journaliste américain décapité, issu d'une famille pratiquante et ultra-sioniste de Miami, disposait également de la nationalité israélienne. Selon les autorités de Tel Aviv, cet élément avait été tenu secret pour ne pas faire courir de risque au reporter devenu otage de l'Etat islamique. Dans la foulée, la presse locale a publié plusieurs éléments biographiques méconnus à propos de Steven Sotloff: âgé de 31 ans, l'homme avait effectué son aliya en 2005 et avait suivi jusqu'en 2008 un enseignement universitaire dans le Centre interdisciplinaire d'Herzliya.

Le lieu n'est pas anodin pour les spécialistes du monde de l'espionnage: il s'agit d'une pépinière de futurs (ou ex) agents secrets israéliens. "Un lieu souvent proche du Mossad", comme me l'avait confié le grand reporter Éric Laurent (Le Figaro, RFI) lors d'un entretien relatif aux délits d'initiés du 11-Septembre.

De 2008 à 2013, Sotloff a ainsi parcouru le Moyen-Orient en sa qualité de journaliste freelance. Ses premiers employeurs: The Jerusalem Post et The Media Line, deux organes proches de la droite dure israélienne. 

De 2011 à 2013, Sotloff a également entretenu une chaleureuse correspondance avec un journaliste israélo-américain passé par la même école d'Herzliya. Dénommé Oren Kessler, l'homme -basé à Londres- est membre de la Société Henry Jackson, influent think-tank du néoconservatisme (pro-Israël, pro-Etats-Unis, islamophobe) à destination de l'Europe. Son compatriote adressa hier, au webmagazine Politico, un texte en hommage à son "presque-ami" qu'il n'eût jamais l'occasion de rencontrer physiquement. Chose étrange: lors de la mise en ligne du papier, hier soir, le site avait la mention de l'école d'Herzliya avant de la faire censurer dans une version ultérieure comme en atteste le cache Google.